Je la vois me dire des choses, je me vois la décevoir, chaque jour un peu plus. Je vois bien qu'elle est persuadée que je pourrais être écrivain. C'est l'artifice que j'ai utilisé pour la séduire. Mais je n'y crois plus moi-même. Et je crois qu'elle non plus, à force.
J'en suis à ce point de l'écriture de mes pensées quand mon téléphone vibre sur la table basse. Elle me demande d'être à la hauteur. Je ne sais pas. Je suis fatigué.
Continuer à mentir pour séduire, pour l'éternité, enfin, bien moins que ça dans les faits. Alors on trouve des artifices, on se donne des rôles, on se lance des défis. Mais nous sommes beaucoup trop inconstants, surtout moi. En permanence, je fais des promesses que je ne tiens que parfois. Vivre à deux, mentir seul. J'espère qu'en face on se contentera de mes concessions.
S'investir entièrement, parfaitement, je l'ai fait beaucoup trop souvent. Je cache désormais le peu de sensibilité qui a survécu derrière un mur de pierres acérées, de celles qui vous écorche les doigts si vous vous y frottez d'un peu trop près.
J'ai l'impression tenace qu'elle pourrait être parfaite. Qu'elle paie un peu pour les autres, injustement. Puis je doute, je me rappelle que j'ai pensé la même chose des précédentes. Puis je faiblis, je me remets à faire ces promesses ridicules de garçon censément amoureux. Je continue à mentir, à séduire. Car finalement ce qui compte c'est le sentiment présent, l'agréable sensation d'aimer et d'être aimé. Même si ça n'est pas la réalité.