Ce qui me porte professionellement, si je suis honnête avec moi même, c’est d’une part l’envie de travailler avec des gens chouettes (define chouette) et d’autre part un veritable désir de frime.
Si on peut résumer ça très prosaïquement : je veux boire des coups avec mes collègues et capter l’intérêt de mes amis quand je leur raconte ce que je fais.
Je me leurre parfois à croire que je veux travailler dans la culture, mais c’est surtout que c’est la frime ultime que j’envie. J’ai vu que je savais me satisfaire d’une frime plus subtile, plus intime. Premier dans mon village plutot que second à Rome.
Mais j’aime bien être le second du premier (ce qui est bien différent d’être sur la seconde marche, le second du premier est juste derrière la première marche). Déjà parce que je manque de désir de commandement, que ma vision du futur est somme toute assez “meh”, en un mot que je ne suis pas un ambitieux.
Il m’arrive, par faiblesse, de jalouser les ambitieux mais très vite après les avoir observé je constate qu’ils ont le regard vide de ceux qui ont trop bu, qu’ils aient l’alcool violent ou l’alcool triste. Moi quand je bois trop, je fais n’importe quoi. Incohérent total, auto-destructeur. Pour mon propre bien je sais qu’il ne faut pas me donner les rennes. Pour le bien de l’attelage également.
J’aime servir ceux qui comprennent où ils vont et pourquoi ils le font quand ce pourquoi n’est pas purement capitaliste (même si, “on vit dans une société”)
Si on me dit qu’il faut rationnaliser, je peux comprendre, mais je ne peux pas agir, rationaliser dans quel but ? Gagner des appels d’offre ? D’accord, mais si on ne les gagne pas ces appels d’offre, d’autres vont les gagner et qu’est-ce que ça va changer ? Quelqu’un d’autre va s’occuper de la même manière, du même boulot qu’on aurait fait nous-même ? Ça change quoi à l’univers ? Je vois pas l’intérêt de répondre en bon soldat à l’injonction que la conccurence est la seule des solutions à l’innovation. C’est une tautologie du système, on se comporte comme des shadocks qui crashent volontairement leur fusée 99fois au prétexte qu’il n’y a que 1% de chance qu’elle fonctionne. En espérant que la 100e elle décolle.
On ne peut pas boire des coups tranquillou avec des gens qui ont à l’esprit la possibilité d’avoir à se battre pour un poste qui va s’ouvrir ou un budget qui va se débloquer. Parce que tout peut être retenu contre vous quand le rideau s’ouvre sur le ring éclairé.
On ne peut pas avoir de parole libérée, de débat, de partage, d’amitié quand on sait qu’un jour on aura à se protéger de son propre fils se glissant derrière soi avec un poignard délicatement ciselé de toutes les faiblesses avouées au cours des années passées.
Et si on ne peut rien se dire alors on ne peut pas ne pas être d’accord. Et c’est important de ne pas être d’accord. Mais là c’est moi qui game le précepte que c’est dans le désaccord que naît l’avancée de l’organisation humaine vers le mieux. Emoji CGT.
Alors quand on ne peut pas boire des coups et que ce qu’on fait n’a pas de sens ? Je crains qu’il n’y ait qu’une seule solution.